Il faisait déjà jour quand je suis réveillé. J’ai jeté un bref coup d’œil sur mon portable, et j’ai vu qu’il était assez tard, ce qui me surprit agréablement. C’était dimanche, aujourd’hui je pouvais me reposer. Je regarde autour de moi… Personne. Mais où est-elle bien passée? Je ne me souviens plus de rien. Décidément, tout se teinte de mystères. Je regarde ma main. J’avais oublié cette cicatrice due aux morceaux du miroir que j’avais cassé… J’ai oublié tant de choses… Le téléphone de la chambre sonne.
_Allô?
_Alors la marmotte, on sort de l’hibernation?
J’ai raccroché. Tom. J’ai pas envie de rire aujourd’hui, pas avec lui en tout les cas. Qu’est-ce qu’il a à me parler de marmotte? Je suppose que mon frère est un dérangé profond. Non je ne le suppose pas, je le sais. Mon
frère est fou. Mais, je l’aime bien quand même (oulala c’est si dur à admettre! Je suis surprenant aujourd’hui).
Je vais me faire couler un bain. Eau chaude. Presque bouillante. J’ai l’impression d’être en immersion totale. Mais j’aimerais que ce ne soit pas qu’une impression. Je suis trop imprégné de ma vie. Je ne peux pas la quitter, quoi que je fasse… Quoi que je désire…
Je veux voir ce que ça fait de couler, de couler pour de bon, alors je plonge ma tête dans l’eau. Quelques secondes. Jusqu’à ce que je manque de souffle, que j’attende encore, et que je ressorte au dernier moment. C’est
de la torture morale, car je me force à ressortir. Si on peut se noyer dans un verre d’eau, alors dans un bain la tâche ne doit pas être très difficile. Mais je ne sais pas ce qui me fait ressortir… Ou plutôt ce qui me fait couler. Car il y a une grande différence entre ne plus vouloir vivre et vouloir mourir.
Je sortais de l’eau quand la porte s’ouvrit.
_Non ne rentre pas!!!
Trop tard, la fille se tenait devant moi, je me tenais devant elle… Mais moi, je n’avais pas de vêtements. Elle écarquilla les yeux et les baissa vers le bas de mon ventre..
_Ehoh ça va la perverse?
Entre temps, j’avais attrapé une serviette de bain…trop
petite. Je me contorsionnais dans tous les sens pour me cacher entièrement. Elle tourna le dos et retourna dans la chambre. Je croyais qu’elle était partie avant que je ne me lève. Mais elle était restée…je ne sais où…
_Tu peux me passer des fringues?
Oui, car doué comme je suis, je les avais oublié de l’autre côté du mur, et il n’y avait plus de serviette assez grande pour que je sorte sans montrer une partie indiscrète de mon corps. Alors j’ouvris la porte d’un centimètre, et je lui demandai mes vêtements.
_Tu veux quoi?
_Alors…Le tee-shirt en bas de la pile de gauche, ah euh non de la pile du milieu, ensuite, euh… le jean sur le cintre euh… quel cintre déjà? Le jean sur le cintre de droite avec euh… la ceinture coincée dedans, la ceinture à clous, et ensuite le boxer Boss dans le tiroir en bas à droite. Je suis désolé de te demander ça. Mais euh…je suis dans l’incapacité de faire autrement.
Elle pouffa de rire en guise de réponse. Finalement, après quelques erreurs au niveau tee-shirt, j’ai eu mes vêtements.
Quand je fus de retour dans ma chambre, je la vis avec des écouteurs dans ses oreilles, normal, elle avait mon baladeur entre les mais. Elle était lovée dans un fauteuil près de la fenêtre, comme toujours, avec ce même regard vagabond…
Je me suis assis sur mon lit, et je l’ai regardée. Comme d’habitude. Tout se joue sur les regards selon moi. Elle a changé de chanson, son regard a tourné dans le mien.
Oui, dans le mien. Ils étaient comme l’un dans l’autre. J’absorbais le sien, elle absorbait le mien. Je me suis levé, elle s’est levée. Elle a fait un pas, j’en ai fait un aussi. J’en ai fait un deuxième, elle aussi. Elle lâcha mon baladeur qui tomba au sol et poussa la mèche qui retombait devant ses, mais elle se retomba aussitôt. Alors je tendis le bras, et lui passa la main derrière l’oreille. La mèche tiendra, cette fois-ci. Elle sourit, et marcha sur le baladeur.
Elle tomba sur par terre.
_Ouïe.
Voilà comment casser un beau moment de romantisme. Elle se mit à rire, puis s’arrêta brusquement. Elle me jeta un regard étrange et me dit:
_T’es bizarre, toi.
_Bizarre, moi? Tu t’es vue?
Elle baissa les yeux, sortit de la chambre en disant:
_Ouais, je me suis vue.
Elle avançait vers la sortie, toutes mes pensées tournaient au-dessus de moi. Que devais-je faire? M’excuser? Dire autre chose? La retenir? Mais mince, je ne la connaissais pas, comment parler à une fille que l’on ne connaît pas? Alors que j’allais l’embrasser, en plus, avant qu’elle ne tombe. Décidément, j’ai de quoi me féliciter. Il aurait mieux fallut que je la joue glaciale avec cette fille sous cet arbre. Mais tout a commencé dans un élan de compassion de ma part. De la compassion, oui, même pas de la gentillesse. Mais je l’aimais bien elle, elle était sympa… Et belle. Car oui, le physique joue toujours.
Je ne suis qu’un pauvre type. Un pauvre con.
_Eh attends!
Et elle claqua la porte.